Non aux péages sur le réseau routier montréalais

Ayant quitté dans la controverse, l’ex-maire Gérald Tremblay caressait le rêve d’implanter des péages sur le réseau routier de la grande région de Montréal.

Oui, des postes de péages obligeant l’arrêt des véhicules ou encore, des caméras qui permettent d’envoyer une facture directement au propriétaire de l’automobile… ou un mélange des deux.

Même Michael Applebaum qui a brièvement pris la place de Gérald Tremblay (et qui a démissionné dans la controverse le 18 juin 2013) était favorable au péage sur le futur pont Champlain (au bénéfice, principalement, d’Ottawa) du moment qu’il y avait une “vision d’ensemble cohérente” qui étendrait les péages à l’ensemble de la région métropolitaine de Montréal.

En clair, des péages un peu partout pour que ce soit “équitable” pour tous les automobilistes, qu’importe la route qu’ils empruntent pour circuler sur l’Île-de-Montréal.

Pas très rassurant pour les automobilistes qui trouve qu’ils paient déjà assez cher pour circuler, surtout à Montréal où il y a une taxe sur l’essence qui, apparemment, ne serait pas suffisante pour entretenir correctement le réseau routier.

Au lieu d’essayer d’améliorer la gestion du réseau routier, les élus ont préféré encourager l’implantation de péages sur des tronçons “en mode PPP” des autoroutes A-25 et A-30, administrés respectivement par des Espagnols (via Acciona) et par des Australiens (via Macquarie Group)… pour une bonne trentaine d’années!

Et ce modèle faisait le bonheur de Gérald Tremblay et de Michael Applebaum alors imaginez le soulagement des automobilistes montréalais quand, le 3 novembre 2013, Denis Coderre est devenu maire de Montréal. Pourquoi? Et bien, on sent que cet homme près du peuple n’est pas à l’aise avec les péages, incluant celui qui est pressenti pour le futur pont Champlain.

pont-champlain-2013

Denis Coderre marque des points lorsqu’il joint sa voix à ceux, comme l’ex-ministre des transport Sylvain Gaudreault du court régime péquiste de Pauline Marois, qui refusaient l’idée d’Ottawa d’imposer un péage sur le nouveau pont Champlain.

Le hic, c’est que cette sortie anti-péages avait lieu pour éviter des débordements sur les autres ponts par les quelques 30,000 automobilistes qui n’auraient pas les moyens de payer au péage du futur pont Champlain… ce n’était donc pas une authentique position anti-péages mais plutôt une volonté d’équilibrer la circulation entre les ponts, comme ça se produit, de manière assez spontanée, en ce moment (parce qu’il n’y a pas de péages, sur les grands ponts qui mènent au centre-ville de Montréal).

Est-ce que Denis Coderre va éventuellement prendre le parti de ceux qui ne veulent PAS de péages, à Montréal?

Difficile à dire puisqu’il constate le manque à gagner pour bien entretenir le réseau routier Montréalais et une grosse partie du problème de financement vient du fait que Montréal, une “créature” du gouvernement provincial, doit continuellement se tourner vers le gouvernement du Québec (un régime libéral sous la gouverne de Philippe Couillard, pour les 4 prochaines années) pour obtenir une partie du financement pour ses projets… et ce va-et-vient administratif finit par user et coûter cher.

On peut penser que le projet de cité-État de Denis Coderre va dans le sens de reprendre le contrôle de l’argent dont il a besoin pour bien entretenir “sa” ville mais l’idée risque de mourir au feuilleton puisque Québec ne voudra pas perdre son pouvoir sur Montréal.

En gardant l’argent à Québec et forçant Montréal à devoir tout soumettre au provincial avant de pouvoir entamer ses projets “locaux”, c’est un peu le gouvernement provincial qui encourage la montée de moyens de financement locaux comme les péages car s’ils sont administrés par Montréal, depuis des artères contrôlées par la ville, l’argent amassé reste dans les poches de la ville… difficile de résister à une telle tentation, pour n’importe quel maire!

On voit que ce n’est absolument pas ce qui se passe avec les partenariats public-privé des autoroutes A-25 et A-30 mais si un jour, Denis Coderre permet l’implantation de péages, l’argent ira idéalement dans le portefeuille de la ville de Montréal ou de la Commission métropolitaine de Montréal qui comprend la quasi-totalité des zones habitées des rives sud et nord, en plus de l’Île-de-Montréal. Dans les deux cas, la stratégie serait d’éviter que le provincial vienne mettre la main sur cet argent généré localement.

Ainsi, le maire Denis Coderre souhaite assurément qu’il y ait libre-circulation sur l’Île-de-Montréal et autour car on ne peut accéder à la métropole que par un pont ou un tunnel, lorsqu’on utilise sa voiture mais économiquement, est-ce possible de faire autrement que de recourir aux péages?

Voilà une réflexion que tous les résidants de la grande région de Montréal doivent avoir puisque les plans pour l’implantation des péages pourraient un jour être retenus et ce jour-là, il sera trop tard pour s’y opposer… tout le monde devra payer, cher, pour chaque passage.

On pourrait aussi parler des effets de l’implantation de péages dans le paysage routier montréalais comme le fait que la destination sera évitée par les automobilistes qui voulaient s’y rendre par plaisir ou même, par affaires! Les commerçants de l’Île-de-Montréal seraient les premiers à se plaindre de la diminution marquée du nombre de clients des couronnes sud et nord qui préfèrent magasiner hors-péages que d’être taxés avant-même d’avoir commencé leur magasinage, sur l’Île!

Que dire de ces travailleurs des banlieues qui doivent travailler sur l’Île ou l’inverse? Oui, les péages fonctionnent dans les deux directions alors dès qu’il y a déplacement, il y a une opportunité pour l’opérateur du péage de s’enrichir, facilement.

C’est ce qu’on appelle faire de l’argent, aller-retour!

Et là, on passe très vite sur l’injustice économique importante à l’encontre des individus au revenu limité qui seraient lourdement taxés pour accéder à différentes zones de la région de Montréal. Ça engendrerait des problèmes sociaux qui auraient d’inévitables incidences monétaires du côté des services sociaux généralement dispensés par le gouvernement provincial alors est-ce qu’on y gagnerait vraiment, au final, en permettant l’imposition de ces péages? Il faudrait des études sérieuses sur le sujet parce qu’au Québec, il y a un effort collectif pour permettre des chances égales à tous et avec les péages, ce principe volerait en éclats.

Le principe de précaution devrait nous encourager à explorer toutes les voies de solution pour la problématique du financement routier de la grande région de Montréal avant d’en arriver aux péages.

Est-ce que Denis Coderre sera le maire qui refusera la levée de péages dans sa ville et par extension, dans la grande région de Montréal? Souhaitons-le mais demeurons vigilants parce que de puissants lobbys d’intérêts privés, d’ici et d’ailleurs dans le monde, tentent de convaincre nos élus que sous leur gouverne, les tronçons de routes financés par des péages seraient une panacée pour la ville qui n’aurait plus à s’en occuper, directement. Il faut aussi ajouter tous les fonctionnaires favorables aux péages qui essaient de convaincre nos élus des bienfaits d’une nouvelle source de revenus locaux pour financer l’entretien des routes. Deux groupes qui tirent un intérêt à favoriser l’arrivée de péages et ce, contre le meilleur intérêt du portefeuille déjà passablement sollicité des automobilistes.

Il y a de nombreux modèles de péages implantés dans les grandes villes du monde et certains croient que c’est au tour de Montréal de suivre cette voie mais les Montréalais, eux, ne sont pas tous convaincus qu’il soit si payant que ça d’imposer des péages, si l’on prend en compte tous les impacts économiques et sociaux que ceux-ci sous-tendent.

Si les opposants aux péages veulent se faire entendre, ils devront le faire aussi rapidement que possible parce qu’en ce moment, plusieurs croient que c’est le proverbial calme avant la tempête… de péages sur les routes du Grand-Montréal.

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