Retour sur le débat du 20 mars 2014

Au beau milieu de l’enlevante campagne électorale provinciale 2014, les chefs des 4 principaux partis politiques se sont affrontés, dans le contexte d’un débat télévisé.

À l’image de la campagne, les chefs ont livré une solide performance.

Il faut dire qu’il faut aimer la politique pour écouter un débat de deux heures sans pauses publicitaires. Pour les amateurs de politique, cependant, ces débats sont du véritable bonbon.

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Ceux qui ont écouté le débat à la télévision de Radio-Canada ont remarqué qu’il y avait des problèmes avec l’image et le son qui coupait, à tout moment. Est-ce que tout le monde a eu ces problèmes? Est-ce que ça ne concernait que Bell Fibe? Difficile à dire mais d’habitude, ces retransmissions sont de meilleure qualité que ce qui a été offert, hier soir.

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Allons-y d’abord avec les journalistes qui ont dirigé ce débat, Anne-Marie Dussault et Sébastien Bovet qui ont posé des questions plutôt longues qui permettaient aux chefs de répondre à ce qui les avantageait plutôt que de devoir répondre à une question courte et ciblée.

Mais bon, les vedettes, ce sont les chefs alors voici ce qu’on a pu observer…

Pauline Marois

Elle ne regardait pas très souvent les téléspectateurs mais regardait les autres chefs avec qui elle débattait. Elle a fait souvent allusion aux 9 ans où les Libéraux de Jean Charest ont occupé le pouvoir et combien les choses —incluant les finances— allaient mieux depuis les 18 derniers mois où elle a tenu la barre d’un gouvernement péquiste minoritaire.

Pour certains, Pauline Marois a fait l’erreur de parler de référendum et de Souveraineté au moment de l’investiture de son candidat pour St-Jérôme, Pierre-Karl Péladeau mais c’est habile parce que les autres chefs ont délaissé leurs propres idées pour parler de cette option et en plus, les membres du PQ faisant partie du noyau dur jubilent à l’idée d’avoir un pays, bien à eux.

Le débat ne nous a donc rien appris sur le référendum qui, selon la chef péquiste, n’aura lieu que lorsque les Québécois y seront disposés. Avec son livre blanc qui doit être publié plus tard, au cours de la prochaine législature, les Québécois en sauront plus sur les idées souverainistes.

Elle a fait référence à son dernier budget, celui présenté par Nicolas Marceau juste avant la dissolution de la Chambre en vue de plonger en campagne. Il s’agit d’un budget marqué d’austérité et on sent que ça ne plaît pas à tout le monde.

Mme Marois a bien parlé et ses partisans ont raison d’avoir eu l’impression d’avoir tenu bon, devant les excellentes attaques des autres chefs.

François Legault

La Coalition avenir Québec (CAQ) chute dans les sondages et le message “les familles ont besoin d’air” ne passe pas ou du moins, pas assez.

M. Legault a été le champion des familles et de la classe moyenne, lors de ce débat. Son objectif de couper 30,000 postes semble irréaliste aux yeux de M. Couillard mais pour de nombreux contribuables qui n’en peuvent plus de l’étouffante bureaucratie provinciale, c’était un message d’espoir. Un message qu’il a livré sans sa femme, Isabelle Brais (qui est là pour rallier l’électorat féminin, historiquement allergique à la CAQ).

“En coupant le nombre de fonctionnaires, on diminue la taille de l’État” expliquait M. Legault et il a raison, qu’importe ce qu’en disent les autres chefs.

En revenant à plusieurs reprises sur son passé de président d’Air Transat, incluant lorsqu’il a dû faire un ménage pour faire face à une compétition qui coupait les prix, il a rappelé aux Québécois qu’il sait comment créer des emplois et les sauver. Est-ce que les mêmes formules peuvent être appliquées au secteur public? Ça reste à voir mais au moins, il tente d’effectuer un virage important pour éliminer une partie du gaspillage au gouvernement pour garder l’argent dans les poches des Québécois.

Philippe Couillard

Tous les chefs présents au débat ont la trempe des chefs d’État mais par son parler (posé et lent), son regard (concentré sur son interlocuteur) et sa prestance, M. Couillard inspire la confiance.

Dommage qu’il ait fait partie de la garde rapprochée de Jean Charest au moment où le Parti libéral a voté 11 fois contre la tenue d’une commission d’enquête sur la corruption dans le domaine de construction. Son image de “défenseur du contribuable” en a alors pris pour son rhume — il essaie probablement de se reprendre en lavant plus blanc que blanc mais pour plusieurs qui veulent s’accrocher à une alternative au PQ et à son projet de “séparation du Canada”, ça fonctionne!

Et d’ailleurs, M. Couillard a joué sur cette peur de la séparation. Ça semble lui faire gagner du terrain alors il va sûrement revenir souvent sur ce thème. Il aurait dû miser encore plus sur son Plan Nord+ et expliquer pourquoi le premier était “insuffisant”.

Impossible de passer outre son costume bleu, sa carte bleue et son épinglette ornant un drapeau du Québec. Il est tellement rompu au fédéralisme qu’il a porté du bleu pour évoquer son amour pour le Québec. Personne ne doute de sa sincérité mais ça faisait un peu excessif!

Question intégrité, M. Couillard veut que M. Péladeau —qui détient environ 40% de tous les médias au Québec— aille plus loin qu’une fiducie sans droit de regard mais Mme Marois a raison de freiner le jeu parce qu’en ce moment, PKP n’est qu’un candidat, pas un élu. Selon elle, on traversera le pont lorsqu’on y sera… et elle raison. Mais une fois rendus au pont, les questions seront à nouveau soulevées!

M. Couillard veut aider l’économie à croître pour faciliter la création de bons emplois (pas des emplois précaires à temps partiel) mais les moyens via lesquels il veut en arriver là laissent plusieurs Québécois sur leur appétit. Saura-t-il détailler davantage ses propositions d’ici la fin de la campagne?

Françoise David

Elle n’a rien à perdre et tout à gagner. La chef de Québec solidaire ne s’en laisse pas imposer. Elle laisse l’autre parler mais lorsqu’elle réplique, elle sourit et expose clairement sa position tout en jetant le doute sur celle de l’autre. Du grand art, quoi!

À première vue, Mme David se fait discrète mais lorsque le thème touche à la Charte des valeurs, à l’économie sociale, à la redistribution des richesses et au “vivre, autrement”, là, elle s’enflamme et donne le goût d’embarquer dans ses idées.

En fait, elle représente la bouffée d’air frais qui donne espoir aux Québécois qu’il y a une façon alternative de faire les choses. Pour le quelque 7% de Québécois qui votent pour QS, ce serait à peu près impossible de voter pour un autre parti tellement leurs idées sont progressistes.

Verts mais pragmatiques, les Solidaires veulent un Québec riche via une économie verte et durable qui va dans le sens de la “culture” de nos ressources, par opposition au “pillage unilatérale par des transnationales étrangères”. Sur ce point, les Québécois tendent l’oreille à QS mais certains ont peur qu’un gouvernement solidaire n’aurait pas la rigueur économique des grands partis. Ce n’est pas vraiment une inquiétude fondée parce que ce sont les fonctionnaires du Conseil du trésor qui alignent les chiffres dans les colonnes et l’idée de mieux exploiter les ressources, dans notre meilleur intérêt, créera de la richesse et ne nous nuira pas. L’économie verte, bien structurée, pourrait en effet faire souffler le vent dans nos voiles économiques.

Le plan de Québec solidaire métrite qu’on s’y intéresse mais pour un gouvernement solidaire, ça demeure ambitieux. Plus de Solidaires dans l’opposition pourrait cependant provoquer davantage de débats productifs sur les décisions que doit prendre le Québec, au cours des prochaines 4 années.

Il y en a eu pour tous les goûts lors de ce débat.

Sauf pour ceux qui militent pour les autres formations politiques, plus petites et incapables de se faire inviter à cette importante tribune télévisuelle.

Les partisans de chacune des formations a raison de se réjouir de la performance de son (ou sa) chef puisque les débats étaient ressentis sans tomber dans les attaques personnelles (bien qu’on ait failli en arriver là, à quelques reprises). Les chefs ne s’aiment pas mais semblent se respecter. Pour les Québécois, la discorde ne plaît pas.

On peut s’attendre à une suite enlevante, pour cette campagne électorale.

Les sujets chauds sont nombreux et au-delà de la santé et de l’éducation qui sont des priorités pour tous les partis, la Charte des valeurs, l’économie, la création d’emploi, l’aide aux familles, les soins aux aînés en perte d’autonomie et même la question de l’indépendance ou non du Québec va nous assurer des débats musclés où chaque parti pourra faire valoir ses positions.

Il reste encore quelques semaines avant de passer au bureau de vote alors ce serait le meilleur moment pour passer au bureau de circonscription de votre candidat favori pour aller jaser et exposer vos idées pour améliorer les performances de notre province, en économie, en santé, en éducation et dans toutes les autres sphères d’influence du gouvernement provincial.

Après tout, c’est peut-être la seule chance que vous aurez de discuter avec le candidat qui pourrait remporter l’élection et être amené à vous représenter pendant 4 ans.

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