Les Québécois qui suivent la Commission Charbonneau ont pu voir Guy Chevrette rouler tout le monde dans la farine, en direct.
Comme d’autres avant lui, il maîtrise l’art du “self-control” devant les caméras et ça lui permet de répondre aux questions sans vraiment divulguer quoique ce soit. Des réponses de politicien mais pas n’importe quel, d’un politicien d’expérience!
Il faut rendre à César ce qui lui revient, Guy Chevrette a le tour de tout retourner à son avantage en s’offusquant lorsque la question le remet en doute (lui, son jugement ou ses actions) tout en laissant couler une rivière de mots qui, au final, n’ajoute rien à la preuve existante, contre lui.
Le nom de Guy Chevrette a été nommé à des nombreuses reprises à la Commission Charbonneau et dans des affaires jugées louches en rapport avec des firmes d’ingénieurs et au premier chef, la firme Roche.
Guy Chevrette sait que le public oubliera son “spotlight” dans les médias d’ici quelques jour alors de passage à la Commission Charbonneau, sa stratégie est simple:
- Protéger son intégrité; et
- Noyer le poisson.
Et clairement, c’est un doctorat qu’il faudrait lui accorder, pour ces deux éléments de stratégie!
Par exemple, lorsque l’avocat de la commission lui pose des questions cherchant à savoir s’il était au courant de certaines décisions, il va presque toujours utiliser le “on savait que” au lieu de répondre “je savais que”… comme un réflexe pour diluer sa responsabilité, à lui, en plus d’ouvrir des portes pour blâmer —au moins partiellement— les autres.
Autre exemple, lorsqu’il parle de Jacques Desjardins (patron d’Asphalte Desjardins et ami de Guy Chevrette), il évoque qu’il était son ami de longue date et il épilogue sur un accident d’hélicoptère que celui-ci aurait eu et bla-bla-bla… il noie —encore une fois— le poisson, esquive la question et roule tout le monde dans la farine en demande une “pause-santé” (ce qui est correct mais le “timing” était nickel). À son retour, il n’y a aucun retour sur la question. Sérieusement, Guy Chevrette sait comment se sortir de situations serrées.
C’est du grand art! Guy Chevrette est un magicien du sauf-conduit oratoire.
Guy Chevrette, l’ancien ministre des transports péquiste, a pris sa retraite de la vie politique après y avoir passé 26 ans (il a démissionné de son poste de député de Joliette, le 29 janvier 2002). À l’évidence, il a eu le temps de se développer un 6e sens pour l’auto-préservation. La politique peut détruire ceux qui essaient d’y faire primer leurs intérêts personnels. Est-ce que Guy Chevrette a toujours agi dans l’intérêt de tous les Québécois ou est-ce qu’il aurait pu favoriser des amis, au fil de ses décisions? Est-ce que Roche a profité de certaines de ses actions, notamment dans le dossier de route dans la MRC de Matawini, dans Lanaudière.
Pour le grand public qui regarde la commission de loin, Guy Chevrette sort presque blanchi parce qu’il sait prendre le contrôle des échanges. Pour les gens du milieu, il est toxique parce qu’en ne prenant pas le blâme pour des actions qu’il aurait pu poser, il repousse celui-ci (au moins en partie) sur d’autres individus avec lesquels il a travaillé et collaboré.
Guy Chevrette n’est pas le genre de politicien qui va prendre un blâme, à part pour des choses anodines qui n’affecteront pas sa crédibilité.
Il n’ira jamais avouer que le fait d’avoir été à des matches de de hockey du Canadien avec Claude et Jacques Desjardins aurait pu avoir un quelconque lien avec la pression qu’il aurait pu exercer sur l’organisateur politique Gilles Cloutier (qui faisait aussi du développement des affaires chez Roche) qui avait apparemment obéi à ses ordres d’accorder un lucratif contrat de pavage à JL Campeau, une filiale d’Asphalte Desjardins, pour une route reliant St-Donat avec les développements à Tremblant. Un homme ayant autant d’expérience sait fort bien à quel point l’image est importante et combien il faut éviter de la ternir… alors il noie son poisson!
Mais les Québécois, dans tout ça?
Et bien, on est rendu à se dire que ça a été indécent de faire passer des intérêts privés avant les intérêts du plus grand nombre mais bon, c’est comme ça que les choses se faisaient, apparemment.
Quand on dit que l’exemple doit venir d’en haut, à l’évidence, ce n’est pas ce genre d’exemple-là qu’il faudrait suivre!
Certains Québécois sont indignés et d’autres demeurent indifférents, comme pour la politique en général. Un homme de grande expérience (politique) comme Guy Chevrette mise, au moins en partie, sur cette vague d’indifférence, alimentée par un fort sentiment de cynisme face à la joute politique qui finit généralement par enrichir unilatéralement des groupes d’intérêts privés, aux dépens et contre l’intérêt du plus grand nombre. Lorsque les gens oublient, des gens comme Guy Chevrette se frottent les mains et se disent alors que “ces histoires sont derrière eux”.
Rien de mal avec le fait de tourner la page mais est-ce qu’on a avancé, collectivement? Pas vraiment parce que Guy Chevrette prétend qu’il n’a rien fait de mal ou d’illégal mais les Québécois, eux, restent avec une drôle d’impression.
Et vous, croyez-vous que Guy Chevrette a absolument tout dit, durant son court témoignage, à la Commission Charbonneau?