Le Québec en entier a entendu parler de cette lettre de Claude Castonguay à l’intention du premier ministre du Québec, Philippe Couillard où il réclâme la démission du ministre de l’éducation, Yves Bolduc pour des gestes qu’il a commis du temps où il siégeait dans l’opposition libérale, à l’Assemblée nationale.
Dans les faits, le docteur Bolduc a choisi d’assumer à la fois son rôle de médecin et celui de député de l’opposition. Sur les 125 députés-élus à l’Assemblée nationale, Radio-Canada n’en a trouvé que 10 qui, actuellement, occupent un « autre » emploi. C’est donc 8% des députés, comme Amir Khadir de Québec solidaire, qui occupent un emploi en plus de leurs fonctions de député.
À la base, on se demande s’il est possible d’occuper deux emplois et de les faire correctement mais selon le docteur Bolduc qui dit en être capable, ce serait possible.
Ainsi, la lettre de Claude Castonguay, ex-ministre de la santé, père de l’assurance-maladie du Québec et fellow-invité au CIRANO, a eu l’effet d’une bombe parce qu’elle dénonce ce double-emploi et la passe d’argent que le docteur Bolduc a obtenu, ce faisant.
On parle de 215,000$ qu’il aurait facilement obtenu via le subside de 100$ et 200$ par « patient orphelin » qu’il aurait « pris en charge ». Ces patients étaient inscrits sur une liste d’attente parce qu’ils n’avaient pas de médecin de famille. Le docteur Bolduc avait repris du service, dans une clinique privée, après la défaite des libéraux aux mains des péquistes de Pauline Marois, en septembre 2012.
Voici une copie exacte de la lettre que Claude Castonguay a rédigé…
Monsieur le premier ministre,
Nous venons d’apprendre que Yves Bolduc, votre ministre de l’Éducation, a reçu pendant qu’il siégeait dans l’opposition son salaire de député, sa rémunération de médecin et une prime de 215 000$ pour avoir inscrit 1500 patients sur sa liste.
Il s’est évidemment servi de sa connaissance du système de rémunération des médecins consenti alors qu’il était ministre de la Santé. C’est ainsi qu’il est allé chercher le maximum en donnant le minimum, aussi bien comme député qu’en tant que médecin.
Alors que le Québec traverse une période difficile, il a donné le pire des exemples en se servant à deux mains dans notre pauvre assiette à beurre. Il n’est plus digne de conserver la haute fonction de ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur.
Lors de votre élection, vous avez pris l’engagement de diriger dans la transparence un gouvernement soucieux avant tout de son intégrité. Vous n’êtes pas sans savoir qu’au-delà des grandes déclarations, votre gouvernement doit prêcher par l’exemple. Vous avez aussi affirmé que, compte tenu de la situation, vous n’hésiteriez pas à prendre les décisions qui s’imposent. Vous en avez une devant vous.
Si vous évitez de la prendre, comment pourrez-vous, face à l’exemple donné par votre ministre de l’Éducation, demander aux policiers, aux pompiers, aux médecins, aux enseignants et à tout le monde de se serrer la ceinture? Il en va de votre crédibilité, de celle de votre gouvernement et de votre capacité d’agir lors des affrontements qui malheureusement vous attendent.
Soyez assuré, monsieur le premier ministre, que j’aurais grandement préféré ne pas avoir eu à écrire cette lettre.
Certains verront une juste rétribution dans les sommes versées au docteur Bolduc mais le sentiment populaire va plutôt dans le sens qu’il s’agit d’un rare épisode d’avarice financière, de la part de ce député-docteur.
Tout le monde a le droit d’améliorer son sort. Personne ne conteste ça mais c’est quand même une disposition que l’ex-ministre de la santé Bolduc a créé et voté lorsqu’il occupait cette fonction dont il s’est par la suite servi pour s’enrichir de manière très importante.
Et dès qu’il a été nommé ministre de l’éducation dans l’actuel gouvernement Couillard, il a abandonné tous ses « nouveaux patients » à la faveur d’une pleine charge de travail ministériel, au sein du gouvernement Couillard. Plusieurs voient là l’épitôme de l’injustice, dans cet épisode d’avarice. Au fond, Yves Bolduc a utilisé ces « patients orphelins » pour faire sonner sa caisse mais n’aura rien à payer alors qu’il les abandonne.
C’est donc une situation qui n’a pas fini de faire jaser parce que le docteur Bolduc dit qu’il n’a rien à se reprocher et qu’au pire, il remboursera de 40,000$ à 60,000$ à la RAMQ… encore là, on est loin du 215,000$ qu’il a encaissé.
Philippe Couillard demande aux citoyens de faire des sacrifices dans le contexte d’austérité qu’il instaure, via diverses directives de son gouvernement, alors la manœuvre d’enrichissement unilatéral de son collègue et ministre de l’éducation Yves Bolduc le met dans l’embarras.
Pire encore, l’encaissement massif d’argent d’Yves Bolduc soulève l’indignation chez des millions de québécois qui travaillent pour un salaire annuel d’une quarantaine de milliers de dollars. Les médecins sont vraiment bien payés, à la base alors quand l’un d’entre-eux utilise l’équivalent technique d’un stratagème pour utiliser « le système de rémunération des médecins » de manière probablement abusive afin de mieux se servir dans l’assiette au beurre collective, ça prouve un énorme manque de jugement, de la part, dans ce cas-ci, du ministre Yves Bolduc.
On aura beau essayer d’être complaisant avec Yves Bolduc, ses gestes vont le suivre pour le reste de sa vie politique et peut-être même dans le volet médical de sa carrière où ses collègues-médecins ne lui pardonneront peut-être pas d’avoir trahi, en tout ou en partie, la confiance de ses pairs et du public.
Rappelons que si ça navait pas été du beau travail journalistique du quotidien Le Soleil, à Québec, cette histoire n’aurait probablement jamais été connue parce qu’on s’entend que ce n’est pas le ministre Bolduc, lui-même, qui serait sorti publiquement pour en parler.
Encore un bel exemple de la nécessité de surveiller nos élus à l’Assemblée nationale. Certains sont peut-être dignes de confiance mais d’autres, à l’évidence, ne le sont pas.