Pour quiconque se retrouve dans une situation financière précaire, il existe certains services gouvernementaux destinés à soulager une partie de la misère humaine qui s’ensuit.
Le plus gros problème, c’est qu’il n’y a qu’une toute petite aide pour d’immenses problèmes.
Au plan technique, l’aide sociale, qualifiée de dernier recours, rapporte environ 623$ / mois à quiconque en fait la demande et y est admis. Avec si peu, comment vivre? Comment payer un loyer? Comment manger?
Voilà des questions bien élémentaires mais au Québec, elles ont beau faire l’objet d’études, on ne sent pas de réelle volonté politique de le adresser, à la faveur des pauvres.
Il y a bien des experts qui noircissent du papier à tenter de répondre à ces questions, comme dans le cas du Centre d’étude sur la pauvreté et l’exclusion (CEPE) du ministère du Travail mais à part nous comparer à pire, à travers le monde, ils en semblent pas être très utiles.
Certes, le CEPE permet à nos élus de déclarer que nos pauvres font moins pitié qu’ailleurs, dans le Tiers-monde mais dans les faits, leurs “constats” n’aident pas les pauvres ou alors, très peu.
Le CEPE mesure le pouvoir d’achat des pauvres, étudie l’ampleur de leur exclusion de la société et la persistance de leur situation de faible revenu mais est-ce que ça aide les pauvres? Apparemment, non.
Ce qui est le plus drôle, c’est que si la pauvreté venait à disparaître, au Québec, ces experts du CEPE n’auraient vraisemblablement plus d’emploi. C’est à se demander si dans le fond de leur psyché, ils ne sont pas contents de voir leur emploi garanti, dans la même mesure que la pauvreté gagne du terrain, partout en province. Bon, c’est plate de penser comme ça mais à voir la relative vacuité de leurs actions, on peut en venir à douter de leur réelle volonté à éradiquer la pauvreté.
Émettons cependant le vœu pieu qu’ils font leur possible pour en finir avec la pauvreté. Personne n’est contre les bonnes intentions. Ce serait génial que leur travail aide les pauvres, pour vrai mais à tout prendre, on va devoir se contenter d’un portrait plus clair de la pauvreté.
Les pauvres
Oui, ces pauvres diables qui chiquent la guenille et tirent Satan par la queue.
C’est tellement divertissant de voir ces personnes normales s’enfoncer dans une déchéance financière qui détruit rapidement le peu de fierté qu’ils avaient.
Avouez que c’est bien plus drôle de voir un pauvre essayer de survivre que de voir votre pharmacienne déchirée entre un VUS Audi et un Mercedes ou peut-être un Cayenne, qui sait? Les aléas des pauvres donnent un bien meilleur spectacle que la platitude de la “vie de château” des riches. C’est peut-être pour ça que les riches sont si complaisants envers la pauvreté, ça les amuse.
C’est raide comme constat mais pour qu’il y ait encore autant de pauvreté au Québec, il faut que ça fasse l’affaire de quelqu’un.
Comme Sam Hamad qui a décidé de faire 0% de sa job tout en récoltant 100% de son énorme salaire qui n’a aucune gêne à s’en prendre aux plus pauvres de la société! Il doit être l’esprit de la fête dans les soirées mondaines avec d’autres riches, comme lui, qui lui tapent dans le dos en riant et en l’enjoignant de continuer à enlever le peu qu’il reste aux pauvres, c’est tellement amusant de voir ces humains tomber à genoux, au propre comme au figuré.
Un pauvre, ça fait travailler les médecins qui virent fous avec la carte d’assurance maladie sur laquelle ils peuvent facturer autant qu’ils le veulent pour leurs “actes”. Bar ouvert! Traiter le pauvre mais jamais l’aider à sortir de la pauvreté. 500$? Bien mieux investi dans les poches du médecin que dans celles du pauvre… et c’est souvent pour ça qu’il reste pauvre, au grand bénéfice du médecin qui, lui, empoche encore et encore sur le dos de la misère du peuple.
Il y a de bons médecins, on s’entend mais le système est pipé contre les pauvres. Des pilules plein les poches mais pas l’ombre d’une aide ponctuelle pour l’aider à réellement améliorer son sort.
Pauvreté en croissance
Ce qui devrait inquiéter la classe moyenne, c’est que la pauvreté gagne rapidement du terrain.
Les raisons sont multiples mais l’accès au marché du travail devient sans cesse plus difficile avec une course folle vers l’hyperspécialisation.
Ajoutez l’informatique qui facilite l’automatisation, la robotisation et la montée en force des processus et protocoles (qui standardisent les tâches) et vous avez une tempête parfaite.
Grâce à la mondialisation, la délocalisation de nos usines décime notre secteur industriel aussi bien que des pans entiers de notre économie du savoir qui doit concurrencer des docteurs en informatique, en Inde, à une fraction du prix, ici.
Saupoudrez le tout avec des paradis fiscaux où les ultra-riches vont stationner leurs milliards, loin des griffes du fisc et vous étranglez si efficacement notre économie que notre mode de vie devient impossible à soutenir.
Moins de paroles, plus d’action
Dans les faits, la pauvreté a mille visages.
Nos élus parlent de pauvreté comme d’une nébuleuse éloignée. Ils y font référence comme s’il ne s’agissait que d’une situation incohérente, par rapport à l’immense richesse de notre société. Et pourtant, la richesse ne pourrait exister dans sa mesure actuelle sans les centaines de milliers de pauvres et les millions qui s’accrochent au bas de l’échelle de la fameuse classe moyenne.
Pour chaque patron qui se paient une grosse Lexus et une cabane d’un million dans un quartier chic, il y a tous ses employés qui vivotent au salaire minimum avec des tâches souvent ingrates. Personne ne s’intéresse au sort de ces employés abusés et forcés d’occuper cet emploi pour survivre, du moment que la classe dirigeante peut s’offrir au moins six gros voyages dans le Sud, à chaque année, en plus de vivre une vie de pacha, sur le dos de son personnel qui ne sait pas comment monnayer correctement sa réelle valeur.
Enfin bref, la pauvreté, c’est un spectre et s’il vous est donné d’y goûter, vous allez réaliser que c’est vraiment toxique.
Rien n’est agréable, dans la pauvreté.
C’est pourquoi nos élus doivent passer de la parole aux actes.
Quelles paroles? À commencer par la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Vous avez bien lu, il existe une loi contre la pauvreté!
Allez la lire pour voir à quel point ces paroles n’ont à peu près aucun écho, sur le plancher des vaches.
Des intentions bien louables mais clairement, entre donner 3,2 milliards de dollars à Bombardier ou sortir le Québec de la pauvreté avec 600-quelques millions de plus, le choix a été facile, pour les “bons rouges” de Philippe Couillard. Bombardier, à 100%.
Près des yeux, loin du cœur
Les pauvres, vous les voyez.
À moins d’habiter dans votre univers de riche avec des problèmes de riches, vous voyez les pauvres à chaque jour.
Tellement que vous ne les voyez plus. Ou alors, vous les éliminez mentalement de votre champ visuel. La vie est bien plus agréable quand on ne voit plus les pauvres. Ouf! Qu’ils sont lourds, ces pauvres, avec leurs demandes de traverses aux passages piétonniers qui ralentissent les automobilistes.
Avouez que sans les pauvres, les policiers, les ambulanciers, les médecins, les travailleurs sociaux, les juges et des centaines d’autres corps professionnels auraient bien plus de temps pour s’occuper des “affaires importantes”, comme s’occuper des riches.
Après tout, ce sont les riches qui financent le système alors pourquoi perdre du temps avec les pauvres?
Si vous trouvez que c’est sévère comme constat, ne trouvez-vous pas que les décisions politiques qui ont cours vont dans ce sens? S’il y avait une réelle volonté d’en finir avec la pauvreté, n’y aurait-il pas des moyens de le faire?
On revient avec la pluie de milliards dans les poches des milliardaires de la famille Beaudoin mais disons que ça illustre bien à quel point la lutte à la pauvreté est loin, très loin, dans les prétendues priorités des élus libéraux.
Comment les blâmer, c’est bien plus agréable de regarder défiler les riches dans leurs gros véhicules flamboyants que de s’indigner du fait que le petit enfant qui accompagne sa mère pauvre n’a pas de mitaines et des bottes de pluie, en plein hiver. Entre une grosse BMW pour Monsieur le Médecin —à grands coup de chic-a-chic sur des cartes-soleil— et un paire de mitaines (vraiment chaudes) pour un petit enfant, pitié, aidez ce “pauvre médecin surmené et tellement bon pour la communauté” à se payer son char de luxe!
Exagéré? À peine.
Promenez-vous un peu et la réalité va vous sauter en pleine face, du moment que vous ne vous fermez pas les yeux, pour ne rien voir.
Car, ne rien voir, c’est une bonne façon d’avoir l’esprit tranquille.
Pourquoi regarder la misère quand les riches peuvent se sauver dans leurs luxueuses demeures? Après tout, ce n’est pas leur problème, pas vrai?
Étudier, sans fin
Enfin bref, la pauvreté, au Québec, elle est étudiée.
Tellement bien étudiée qu’on sait qu’elle existe et qu’elle ruine des vies, une génération après l’autre.
Des faits, solides et vérifiables, il y a en assez pour se faire une tête à vouloir livrer un grand combat contre la pauvreté. Personne ne remet en doute l’existence de la pauvreté mais malgré ça, la pauvreté persiste.
Croyez-vous qu’à force d’étudier, il y aura un jour un élu —pas trop rompu aux agendas économiques égoïstes des riches— qui aura le courage de sortir sa tête du cul-de-sac académique qui “étudie” la pauvreté pour faire des choix courageux afin d’éradiquer la pauvreté?
Même si ça ressemble à un rêve, il faut y croire parce que la pauvreté, elle, n’arrête pas de progresser et elle fait un mal incalculable… bien au-delà des dommages économiques.