Le PQ brise sa promesse d’élections à date fixe

La campagne électorale provinciale est officiellement lancée depuis aujourd’hui, en après-midi. Le scrutin aura lieu le 7 avril 2014 mais elle aurait été censée n’avoir lieu qu’en octobre 2016.

Pourquoi? En raison d’une promesse péquiste d’élections à date fixe!

Vous avez bien lu, c’était le Parti québécois qui avait gagné la faveur populaire avec sa promesse d’élections à date fixe mais comme le Parti conservateur au fédéral, ils ne se sont pas embêtés de cette loi pour lancer leur campagne électorale aujourd’hui et ainsi déroger à leur propre promesse.

Notons qu’officiellement, au fédéral et ailleurs au Canada (dans 8 autres provinces), les élections ont lieu à des dates fixes. C’était censé aller en ce sens aussi au Québec alors qu’à l’automne dernier, une loi avait été adoptée à l’unanimité pour que des élections aient lieu à date fixe, au provincial. La date déterminée d’avance était fixée en octobre 2016 mais le PQ mise à fond sur l’absolue nécessité de se lancer en campagne électorale, malgré tout, pour des raisons qui ne font présentement pas l’unanimité.

Pourquoi s’en faire avec la dérogation à la loi alors que ça n’a aucune conséquence juridique? Peut-être parce que le déclenchement hâtif, après seulement 18 mois de gouvernement péquiste minoritaire, semble déroger à l’esprit de la loi sur les élections à date fixe. Et violer l’esprit d’une loi, pour les contribuables qui devront assumer le coût de la démocratie, estimé à quelques 80M$ pour ce scrutin, c’est mal reçu.

Évidemment, 80M$ pour élire une nouvelle législature à l’Assemblée nationale, sur un budget annuel provincial dépassant les 60MM$, c’est peu mais lorsqu’on replace cette somme par rapport à un salaire annuel de 32,000$, c’est comme payer le salaire annuel de 2,500 personnes! Tout ça pour marquer un petit papier d’un coup de crayon, quelques millions de fois. C’est là qu’on se met à rêver que la majorité pourrait voter en ligne alors que les personnes âgées restantes pourraient le faire de manière plus usuelle, sans engendrer le dixième de ces coûts mais bon, le gouvernement n’évolue pas aussi vite que le reste de la société alors on en sera peut-être dans 2 ou 3 élections, si on est chanceux… ou trop cassés pour procéder autrement, comme pour ce scrutin 2014.

Alors qui, au Parti québécois, a promis de s’en tenir à des élections à dates fixes?

Bien que tous les députés de l’Assemblée nationale —tous partis confondus— aient appuyé cette loi, c’est Bernard Drainville, député-sortant de Marie-Victorin qui a mené la charge. Pauline Marois en a fait une promesse d’élection en septembre 2012 (il s’agissait de réparer le lien de confiance entre la population et les élus, rien de moins) mais c’est vraiment Bernard Drainville qui a fait les plus mémorables déclarations.

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Voici ce que le député et ministre responsable des Institutions démocratiques Drainville a déclaré, en Chambre, le 15 novembre 2012 (date rappelant la première élection du PQ de René Lévesque) en présentant son projet de loi qu’il qualifiait d’historique:

“…quand on voit l’espèce de mépris, de dégoût que beaucoup de nos concitoyens ont envers tout ce qui touche de près ou de loin à nos institutions démocratiques, il me semble qu’on est conviés, nous, comme élus, à un rendez-vous, là…”

Disons que la met la table de manière passablement solennelle pour un futur où les petits calculs partisans ne pourront plus avoir lieu sur le dos d’élections “fixées” pour des raisons propres à l’avancement du parti au pouvoir alors comme au Canada et aux États-Unis, le Québec s’en tiendrait désormais à des élections à date fixe. Enfin, c’était l’idée du projet de loi…

Pauline Marois faisait donc le sacrifice de donner l’exemple, par intégrité démocratique.

M. Drainville avait d’ailleurs déclaré:

“…il y a quelque chose de formidable, là-dedans, M. le Président [de la Chambre], dans le fait que la Première-ministre soit prête à renoncer à ce pouvoir-là [la fixation, à sa guise, d’une date de scrutin]…”

Aujourd’hui, on peut affirmer que ce sacrifice n’a pas eu lieu.

L’opposition a déjà réagi à ce qu’ils qualifient de bris de confiance avec la population parce qu’au fond, le PQ a voté une loi mais on le voit aujourd’hui, ça n’a rien donné parce qu’ils ne l’ont même pas respecté. Ça envoie toutes sortes de signaux contradictoires!

Le Parti québécois a cependant fait valoir que les partis d’opposition ne lui laissent pas le choix car ils critiquent le budget Marceau et ils pourraient utiliser ce prétexte pour renverser leur gouvernement. Les électeurs sont libres d’y voir un cas de force-majeure ou simplement, de l’opportunisme politique.

On se demande vraiment si la CAQ aurait renversé le gouvernement sur son budget parce que ça ne va vraiment pas bien pour eux, dans les sondages. Le PQ a-t-il vraiment eu peur que la CAQ vote contre le budget dans le but de le renverser? Apparemment oui mais plusieurs doutent que ça se serait passé comme ça.

Si on revient à la loi sur les élections à date fixe, ce qui confond le plus ceux qui ont suivi le dossier, c’est le fait que Pauline Marois était consciente de son statut de gouvernement minoritaire et elle s’était, malgré tout, engagée à respecter cette loi.

Voici comment Bernard Drainville faisait valoir la position du PQ, en Chambre:

“…les Québécois auraient beaucoup de difficulté à comprendre, M. le Président, qu’un parti politique soit d’accord avec des élections à date fixe si on est majoritaire mais qu’il ne serait pas d’accord s’il était minoritaire.” Et ensuite il déclare: “On a un principe ou on en a pas!” — Ouch!

Il en prend pour son rhume, ce principe, aujourd’hui!

On peut conclure qu’il s’agit d’un principe à deux vitesses, à savoir que lorsque ça ne fait pas l’affaire du PQ, cette loi d’élections à date fixe peut être mise à la poubelle, sans autre égard.

Ainsi, même si le fait de déclarer des élections aujourd’hui est contraire au principe qui guide la loi sur les élections à date fixe mais rappelons que ce n’est pas, techniquement, illégal.

Maintenant, le fardeau de la preuve revient au PQ qui doit justifier que sa décision de provoquer un débours de 80M$ pour aller en élections n’était pas d’abord le fruit de calculs partisans.

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